phoenix, arizona — thème city-gang sombre, flicaille, bikers. époque actuelle // réservé à un public mature et averti-18
wall of glory
hides the face, lies the snake;
terre suinte vermillonne, tapagée par les heurts de mille feux; poussière précieuse, que convoitent ainsi les bannières dissidentes. car meutes jacassent ainsi, comme chasse à courre. couchés sur montures rutilantes, reîtres arborent le cuir cousu au battant. ils gerbent l'ivre violence en marasme chantant comme saints paillards. et sur plèbe ployée, manigances ouvrent jugulaires en traînées caillées. car v'là que rouges cabales déparent l'humanité en mascarade affligeante; dans l'antre de l'oiseau aux ailes-flammes, cabots font montre de sales babines devant cavalerie, ces nobles barbares polissant l'écusson. mais ô belle ironie, à jeter ainsi soldats cannibales dans l'antre déjà ravagé!
i'd rather regret the things i've done than regret the things i haven't done.
Cavité creuse pulsant dans sa poitrine dans un rythme régulier ne donne pas l’alerte sur l’état pensif du gamin du sidh. Sa respiration est lente, son souffle est maîtrisé. Capuche rabattue sur la tête, vêtements sobres et discrets, il n’est qu’un homme foulant le sol de Phoenix sans prétention. Je suis un connard par nécessité, pas par envie. Ces mots résonnent en croche dans son crâne, se répercutant dans un écho où chantonne une vérité froide. S’attacher à quelqu’un, c’est finir par faire des erreurs ; être dépendant, raccroché à ce lien, ce fil tendu qui peut se briser à tout instant. Il a coupé les ponts avec sa mère parce qu’il ne peut pas l’encadrer ; s’est éloigné de sa sœur parce qu’elle ne pouvait plus jouer son rôle d’aînée avec lui. Jamais vraiment d’attaches. Des camarades qu’il ne rappelle jamais ; le monde est vaste, tout le monde s’en remettra, personne n’est indispensable. Une soirée qui passe bien et aucune envie de revoir la personne. Pas parce que la nuit était mauvaise, simplement parce qu’il pense qu’il portera la poisse à la personne ; cruellement réaliste dans une seule vie qui ne demande qu’à être vécue.
Clope au bec, mains dans les poches, il retourne au centre social où il est arrivé comme un sauvage avec ses gars, une opération éclair qui ne s’est soldés que par un gamin en manque en liberté dans les rues de la ville. Un franc succès si on considère que l’ordinateur est en sécurité – entreposé chez Llywelyn justement ; un échec cuisant sur le plan humain. Voilà sans doute pourquoi il a proposé sans réfléchir à Sofélia de l’aider, se surprenant lui-même de son initiative. Et quelque part, il sait que c’était la bonne chose à faire. Son arme coincée dans son dos, ses earplugs bien en place ; il ne refera pas la même erreur stupide de se croire en sécurité à l’extérieur de chez lui ou dans les locaux de la sup. Quoique.
Il se sent responsable de cette situation, à toujours vouloir pousser à bout pour voir ce que ça fait. Ce désir malsain de créer quelque chose à force de franchise mal foutue sans réellement s’étonner que ça finisse mal. Sans ressentir une réelle culpabilité face à tout ça en dépit de son implication, il compte sur sa conscience qui le titille suffisamment pour rattraper une situation qui peut l’être. Avant de se rendre au centre, il va chercher deux cafés ; la nuit risque d’être longue et pas pour les mêmes raisons que la veille. Cette pensée le fait vaguement sourire tandis qu’il attend sa commande. Encore ces verres qu’ils enchaînent, le courant qui passe bien ; il la ramène chez lui. Le matin, plus personne jusqu’à se retrouver en matinée pour une raison désagréable, la sensation de colère qui gronde parce qu’elle n’a pas aidé – ou plutôt, elle a aidé la personne qui en avait vraiment besoin et cette arrogance qui n’appartient qu’à lui en train de lui susurrer que ça aurait été bien plus rapide si elle avait coopéré tout de suite. Après, ils auraient pu négocier. Enfin, le soir-même, ils se retrouvent pour chercher Gregorio.
Et le pire dans tout ça, c’est que c’est lui qui a contacté la jeune femme. « Thank you, have a nice evening », remerciement dans un sourire au type qui lui a tendu les cafés, note réglée et voilà qu’il ressort.
Pas de masque à revêtir, personne à impressionner, personne à se mettre à dos, personne contre qui se battre, juste une soirée presque normale où ils vont arpenter les rues à la recherche d’un drogué en manque en espérant qu’il n’ait pas fini avec une balle dans le crâne ou un autre sort tout aussi morbide. Une fin qu’il ne mérite clairement pas, et cette pensée le fait frémir tandis qu’il arrive enfin à destination et cette fois, a cette décence d’attendre en bas à l’heure pétante du rendez-vous. Llywelyn n’est pas passionné comme la veille, pas énervé comme ce matin ; juste profondément calme d’un homme qui a repris contenance et s’est calmé pour redevenir maître de lui-même. Un contrôle dont il a besoin pour avancer dans sa vie qui n’est qu’une série d’algorithme avec des if, des else, pour pallier chaque éventualité si une ligne ne fonctionne pas. Pour que toute la structure ne s’effondre pas bêtement parce qu’il n’a pas pensé à tout.
L’Homme restera affamé de contrôle mais doit d’abord apprendre à se contrôler soi-même.
Llywelyn tourne les yeux vers Sofélia quand celle-ci descend et, avec un léger sourire, tend vers elle les deux cafés qu’il tient en les désignant l’un après l’autre. « I got you a coffee. I don't know how you like it, so there's one black with no sugar and one with cream and milk. It's going to be a long night, so we'll have to keep our eyes open. »
"l'océan qui emporte,
l'océan qui déborde,
à l'intérieur"
saisons : [trente] pétales effondrés au sol, perdus à jamais, l'absence totale d'intérêt, mais jamais ne revinrent les jours de la plus précieuse insouciance, ceux dont on sait qu'ils continueront de passer par milliers.
myocarde : piétiné par les jolis mots et les douces paroles, lavé par cet espoir que tout change, et cet espoir rongé pour toujours, comme un vieil os offert à un chien. se complaît à remplir son lit, pour oublier le [vide] de sa poitrine.
besogne : vie dévouée à l'Autre, pour toujours, [assistante sociale] offerte corps et âme.
district : parce qu'elle crevait de son hypocrisie, déménagement dans le [south district] pour être plus proche des siens.
it was so annoying, how worried she was, and how the world didn't care.
n o s t a l e m a t e
La journée avait été d'une longueur éprouvante et, toute entière lancée dans sa quête qui semblait vaine, elle n'avait pas vu le temps passer. Sans manger, se faisant un sang d'encre pour qui elle avait fait fuir quelques heures plus tôt, elle avait écumé les rues de la ville, cherchant son patient tout autant que montait en elle une inquiétude démesurée; quelque chose s'était produit, elle en était certaine. Mais Letty l'avait rassurée, tout autant que ses autres collègues, elle était pleine d'une nouvelle énergie à présent; il fallait le retrouver, le soustraire à ces ombres dans lesquelles il avait trop l'habitude de se lover, qui l'accueillaient trop souvent. Ensuite, il serait temps de réfléchir à une nouvelle cure. Le retrouver, l'aider, c'était possible. D'autres y étaient arrivés avant lui alors, tout était possible.
Elle était rentrée pour faire une sieste, avant de retourner à l'assaut des rues sombres, elle était rentrée et elle peinait à garder les yeux ouverts ; cela promettait une seconde nuit de trop peur d'heures, les mêmes acteurs, mais le film promettait d'être bien différent. Elle avait été surprise par la proposition du flic, comme s'il leur devait quelque chose, et au fond, c'était le cas, peut-être que s'il s'était rappelé qu'il pouvait parler correctement à un autre être humain, ce dernier ne se serait pas enfui mais ils étaient combien, ceux qui n'auraient pas accepté leur erreur, ceux qui auraient préféré se dire qu'ils avaient fait ce qu'il fallait, et peu importait le reste? Trop nombreux, et elle appréciait cet état d'esprit. Peut-être pourraient-ils le retrouver, et surtout, peut-être pourrait-elle s'aventurer dans des endroits où aller en tant que femme seule était trop dangereux. Avec lui, de nombreuses perspectives s'ouvraient. Mais elle s'attendait trop à ce qu'il ne vienne pas, avait même prévu le message adapté à lui envoyer une fois qu'elle serait assurée qu'il s'était défilé. Elle retourna en vitesse au bureau, récupérant le dossier de Gregorio pour avoir sous la main les diverses adresses des squat l'ayant hébergés ces derniers mois.
Surprise en découvrant sa silhouette qui l'attendait devant la porte du centre, plus surprise encore de le voir sourire. Il était de ceux qui cultivaient le secret et elle était d'autant plus étonnée de découvrir qu'il ne portait plus au fond des yeux cette arrogance qu'il avait déversée sur Gregorio, et qu'il avait revêtu ce même sourire qu'il avait eu en l'abordant, la veille au soir, et elle sentit son crâne s'emplir d'encore plus de questions. Suivant son regard, elle acquiesça et attrapa le café à la crème qu'il lui tendait et, dans un sourire, répondit « thank you ! I mean.. really. I thought you wouldn't come. » Sans lui laisser l'obligation de répondre, elle se mit en route et se brûla la langue sur le café qu'il venait de lui offrir; il était réconfortant, doux et fort, un délice, et elle sentit son coeur se réchauffer face à la tâche à accomplir. « I thought we could check his usual squats and talk about him. maybe someone has heard about him today. » Elle cachait difficilement son inquiétude, mais elle n'avait pas non plus envie de le laisser accéder à cec qu'elle avait de plus précieux - son amour pour l'Autre, sa conscience professionnelle qui l'empêcherait de dormir jusqu'à ce qu'on le retrouve.
« So... Didn't you have better things to do tonight ? It's not the neighborhood you must be used to.. » Elle lui cacha la dangerosité de leur entreprise, entre trafics nocturnes et junkies en manque, parce qu'il ne devait pas être aveugle ou détaché des quartiers sud à ce point; il savait forcément dans quoi il s'était embarqué.
i'd rather regret the things i've done than regret the things i haven't done.
La plupart des disparitions se soldent par des échecs. Constat amer peu amène tandis que la réalité frappe brutalement la pensée collective. Enlèvement, fugue ; on ne retrouve jamais la personne ou alors en pièces détachées disséminées dans des sacs afin de ponctuer l’horreur de la situation. Parfois enfermée dans une pièce sombre pendant des mois, malnutrition, maltraitance et vices enflammés à même la peau. À regretter la faucheuse qui n’a fait que tourner le dos plutôt que de soulager une conscience et l’aider. Parfois, elle fait bien de ne pas prendre ; cette seconde chance terrible qu’on peut saisir si on sait où s’accrocher à des prises solides, pas celles faites d’argile qui précipiterait une chute vertigineuse. Jamais Llywelyn n’a été optimiste face à ces cas si particuliers, des dossiers qui finissent par être refermés avant de retrouver la lumière des années après grâce à un indice impromptu dans cette jungle immense qu’est le monde. Se prépare plutôt au pire que d’espérer le meilleur. L’espoir est une chose, mais espérer bêtement n’a jamais été dans sa manière de fonctionner.
Le café crème part, ne lui reste que le sans sucre qu’il savoure avec plaisir. Un addict au café malgré lui, ne lui fait plus aucun effet là où il restait éveiller pour tester de nouvelles fonctions et déverrouiller de nouvelles portes virtuelles. « I'm not used to making empty promises. » Ni d’en faire de manière générale bien que ce ne soit pas anodin, la difficulté à les tenir et satisfaire tout le monde n’est qu’un algorithme de plus que l’on ne peut pas craquer aussi facilement ; c’est possible, mais avec des lignes et des lignes de code en plus pour être sûr que la boucle sera bouclée sans plus d’inconvénient. L’Irlandais ne réfléchit pas avec son cœur, il laisse son myocarde chaleureux hors de toute négociation malgré sa décision de venir ce soir, d’avoir apporté un café sans savoir si elle allait l’accueillir ou au contraire, le renvoyer. Si Sofélia sait le contredire au pire moment et lui tenir tête, c’est bel et bien cette panique si caractéristique d’un proche disparu qui se peint sur ses traits délicats ; l’observe un court instant en la suivant, braquant son regard sombre droit devant lui. « If it is in need, it will also look for supplies. Would he have enough money to buy a dose or would he contract a debt with a dealer to get what he needs ? »
D'accord, peut-être qu’il est un peu trop pessimiste et qu’il ne croit pas qu’un drogué en manque et dans un état de panique extrême puisse réagir avec lucidité. Pour le flic, c’est retour à la case départ pour tenter d’oublier quelques heures la situation qu’il a pu vivre – et ce, par sa faute. Pourtant, Llywelyn ne culpabilise pas. Son boulot n’est pas de se faire des amis, même si ce serait fort utile dans une ville comme Phoenix, d’étendre de nouvelles notes sur sa portée. Conclure de nouvelles alliances qui permettraient à la SUP d’avoir une longueur d’avance sur ces connards de la 3C. Réfléchir plus loin, dans le futur. Ne pas se cantonner au présent. Une mélodie constante avec un accord, deux, trois ; une symphonie en devenir. C’est ça, une idée. Remplie de notes ; toutes ne sonnant pas justes mais l’ensemble formant quelque chose d’intéressant, qui mérite d’être joué au moins une fois.
« You think I'm the kind of guy who wears suits, lives in glitter and enjoys a good meal with an expensive glass of wine ? » Un sourire amusé étire ses lèvres. Régulièrement, il jette des coups d’œil à la jeune femme pour voir si elle lui parle. Ne commettra pas la même erreur plus tôt dans la matinée, quitte à faire répéter. Devenu expert à lire les lèvres, les gens se fourvoient la plupart du temps en captant son regard. Ne se gêne pas pour briser les malentendus sans jamais trop en dire. « It's quite true, in fact. I like to call myself an asshole, but I've worked hard to get where I am. Don't think my hands are clean, I know these neighborhoods better than you think. » Avant d’être sous-commandant, il a été sur le terrain, de nombreuses années. Il a tout accepté, tout ce qu’on voulait bien lui donner ; il a bossé comme un acharné pour avoir de moins en moins d’ordre à appliquer, pour finalement avoir le rang qu’il souhaitait et pourtant, ce n’est toujours pas assez parce que Llywelyn est trop ambitieux. Une ambition qui ne restera qu’un morceau inachevé. « What do we check first ? The places he might have gone or the potential dealer he might have spoken to ? »
"l'océan qui emporte,
l'océan qui déborde,
à l'intérieur"
saisons : [trente] pétales effondrés au sol, perdus à jamais, l'absence totale d'intérêt, mais jamais ne revinrent les jours de la plus précieuse insouciance, ceux dont on sait qu'ils continueront de passer par milliers.
myocarde : piétiné par les jolis mots et les douces paroles, lavé par cet espoir que tout change, et cet espoir rongé pour toujours, comme un vieil os offert à un chien. se complaît à remplir son lit, pour oublier le [vide] de sa poitrine.
besogne : vie dévouée à l'Autre, pour toujours, [assistante sociale] offerte corps et âme.
district : parce qu'elle crevait de son hypocrisie, déménagement dans le [south district] pour être plus proche des siens.
it was so annoying, how worried she was, and how the world didn't care.
n o s t a l e m a t e
Elle en avait trop vu passer, Sofélia, des grands absents, ceux dont on finit par oublier le nom, en perdant leur trace. Elle en avait un casier plein, au bureau, de ces dossiers qu'on ne réouvrirait plus, qui s'étaient fissurés et perdus, et jamais, elle ne se résoudrait à les ouvrir à nouveau, encore moins à les jeter. Ils faisaient partie de ces êtres que la vie a oublié de gâter, ces passants inconnus qui ne font plus même lever le regard, qu'on remarque quand ils ne font plus la manche devant l'arrêt de bus mais qu'on a oublié dans la minute. Les grandes âmes errantes de ce monde. Elle n'avait pas envie que cette situation se solde de la même façon, elle refusait que Gregorio leur échappe et pour cause, cela n'en ferait qu'un de plus, et elle ne voulait pas lui offrir cette lugubre place. « I can see that. »
Elle était habituée aux fausses promesses, Sofélia, elle n'avait passé sa vie qu'à les entendre et elle se demandait toujours ; étaient ils au courant qu'ils mentaient, se leurraient ils suffisamment pour oser prétendre y croire ? "ta mère et moi seront là pour ton récital!", "j'vais raccroche sofélia", "je reviendrai pour toi", bla bla. Chuchotements habituels et futiles de qui n'avait déjà plus assez de prise pour blesser son coeur. Alors, quelque part au fond d'elle, elle est surprise et aussi un peu touchée ; les gens de parole existent bien, alors. Elle réfléchit un instant à sa question, son allure se calant sur celle de son partenaire et, après avoir pris une gorgée, ajouta « I think he don't have enough money but... Those guys will give it to him for free if that means he'd owe them. »
Elle était devenue experte dans les traquenards dans lesquels tombaient ceux qu'elle fréquentait, elle connaissait par coeur les rouages morbides de leurs cerveaux psychopathes et alors, elle n'avait aucun doute sur la suite. Une dose, une dette, de la vente facile, et puis, un coup plus dur, un braquage? Un meurtre? Il risquait d'y crever au passage, mais qui ça intéressait réellement, la vie d'un junkie? « If he has resist his craving, he can be with the troopers. They are a small group people who win against their addiction. They own an old house near by and ... let's say if you're on a drug journey and you want to quit, the hard way, they can help. » Elle les connaissait bien, elle y avait accompagné de nombreuses personnes dans le besoin et elle trouvait le concept bien trop intéressant pour ne pas susciter l'engouement des autorités - mais encore une fois, quel prétendant à la mairie irait mettre en place des aides pour le sevrage des junkies ? Dans la maison, des chambres d'isolement avaient été mises en place dans le sous-sol et si le mobilier, fixé au sol, empêchait quiconque de se blesser, une supplémentation en anxiolytiques étaient dispensée. La survie n'était pas aisée, mais après un sevrage aussi sauvage, les corps étaient lavés.
L'image de lui que Llywelyn lui offrit la fit sourire, mais s'il se trompait, il n'était tout de même pas loin de la vérité. Elle l'avait imaginé dans un appartement vaste même si peu décoré. Pas de cadre, un mobilier neutre, pas trop d'originalité. Un piano dans un coin, peut-être, qu'elle n'aurait pas vu en s'échappant au petit matin, un frigo rempli de plats préparés et de bière à s'ouvrir en lisant le journal. Des choses qui collaient à ce qu'il dégageait, mais peut-être se trompait elle effectivement. Elle jeta un œil aux earplugs qu'il avait en place, se rappelant ce qu'il s'était passé le matin même et, dévorée par la curiosité, elle se tut. Cœur atrophié malgré tout trop tourné vers l'Autre, elle ne trouvait rien de plus satisfaisant qu'un être s'ouvrant à qui écoutait silencieusement, mais elle savait sa curiosité parfois trop intrusive aussi, elle se contenta de lui répondre « I'm sure you did, no one gets in your position not giving a dawn about what he's doing. I'm glad you're there to help me. » Rien de plus à ajouter, elle s'était mépris sur lui, il avait fait de même à propos de Gregorio, il était plus que temps de se mettre au travail. Elle se tourna vers la rue menant aux Troopers et lui pointa la direction de la maison au bout. « Troopers live there, I just want to know if he's in there. They know me, they'd tell me. » Elle l'espérait, en fait, même si cela signifiait que leur soirée serait rapidement terminée. Remontant la rue sale de ce quartier délabré, elle toqua à la porte en bois sombre et lui ajouta « They are angels, really, without them, we'd find corpses all over the streets, everyday. » Quelques instants suffirent à l'homme qui vint leur ouvrir pour leur annoncer que non, il n'était pas ici et qu'il ne l'avait pas vu. Echange de numéros au cas où, et l'estomac de la jeune femme se noua un peu plus. « Let's find his dealer. I hope we don't look too "cop"... » L'espoir qu'il ait trouvé en lui la force de résister s'était évanoui et avec lui, la perspective de le retrouver en bonne santé.
i'd rather regret the things i've done than regret the things i haven't done.
Ne rien demander maintenant pour mieux réclamer plus tard, un grand classique d’escrocs et ce que ferait certainement Llywelyn, d’ailleurs. Un petit pourcentage pour mettre au pas celui qui lui doit quelque chose ; ainsi va la vie. Pas de bonté d’âme, seulement réclame sans se soucier des mains sales. Doigts immaculés à la crasse incrustée, encore un masque et encore une désillusion. L’Irlandais ne fait pas confiance, n’y arrive pas. Trop indépendant ou simplement si méfiant qu’il ne parvient pas à se fier à quelqu’un ? Ou sûrement trop menteur pour avoir la présence d’esprit de craindre qu’on le démasque. Pourrait n’avoir rien à se reprocher et en même temps, aurait suffisamment de preuves pour se faire inculper. Une incursion intrusive dans la vie d’autrui pour obtenir le maximum d’informations sans se soucier de l’éthique désastreuse dont il semble ignorer complètement la définition ; ou s’est décidé il y a longtemps d’enterrer cette bonté au plus profond de son être pour être dénué de scrupule. Comme il a agit avec Gregorio plus tôt dans la journée.
« It's hard to pay off debt these days. Even harder in a world like this, where those who want to forget are up against sharks too ferocious to leave them in one piece. » Un fatalisme délicat sous un air détaché, un fait que l’on énonce sans bégayer ni sourciller. Les personnes sensibles comme Sofélia sont utiles, pour le côté empathie et de l’autre, il y a les gens comme Llywelyn qui n’ont pas l’air d’avoir de cœur alors qu’il ne s’agit juste que de dissocier deux réalités. La réelle et celle dont on se berce le soir avant de dormir. La maison des troopers lui fait hocher la tête sans qu’il ne cherche à contredire la jeune femme. Le revolver dans son dos est presque rassurant, même s’il souhaiterait au conditionnel ne pas avoir à l’utiliser. Fragment lucide dans un monde où la loi du plus fort prime sur tout le reste ; peu désireux d’avoir à rendre des comptes alors qu’il n’est pas en service. L’étiquette de sous-co lui colle à la peau, mais le soir, la nuit, quand il n’a pas d’urgence, il redevient simplement un homme. « I may be arrogant, and I'm sure it's very old-fashioned, but I don't like to see a young woman alone in these streets. » Il ne se prend pas pour un sauveur ou qu’importe, mais il sait que dans l’ère du temps, même si une personne est capable de se défendre, fini par tomber sur plus fort que lui ou elle.
Et Sofélia, il l’aime bien. Dammit.
Lorsqu’ils arrivent aux abords de la maison, le flic laisse sa compagne parler, restant silencieux, les mains dans les poches. Le risque ici, c’est qu’on le reconnaisse. L’Irlandais n’a pas vraiment de pitié envers les petites racailles, les dealers ou les consommateurs qui, malheureusement, tombent dans le piège infernal sans savoir encore qu’ils ont vendu leurs âmes au diable. Gregorio n’est pas ici, et il se retient de questionner un peu plus en détail. Pas en service, pas de flic, juste deux personnes qui s’inquiètent pour une troisième mais Dieu sait que ça le démange. À la place, il soupire légèrement en rebroussant chemin avec la jeune femme, baissant un regard vers elle. « Does he have just one dealer, or several ? Does he always deal with the same guy, or does he talk to an underling ? And above all, does he owe this guy anything ? » C’est dur, vraiment dur pour Llywelyn de se taire en réalité. Cette envie de tout contrôler comme on contrôle le tempo d’une chanson, qu’à partir de la clé pour démarrer, il y a cette mesure de tout arrêter s’il le faut. Là, ils peuvent potentiellement s’entraîner dans une chute qu’ils ne pourraient pas maîtriser s’ils ne font pas attention. La dernière remarque de la plus jeune le fait même ricaner malgré lui. « You don't look like a cop. Maybe a weasel, but not a cop. » Lui, rien n’est moins sûr. Même si l’équipement est resté chez lui, bon, ça fait huit ans qu’il arpente les rues à traquer des criminels et être sur le terrain. Avec un peu de chance, l’obscurité et une capuche relevée pourraient faire l’affaire mais il n’y croit pas trop. Enfin, il peut dire qu'elle ressemble à une fouine, mais il en est tout autant une et ça, il ne peut pas le nier. Cependant, il voit bien que tout ça l’affecte. Et cette fois, il retient le soupir qui menace de soupir. Llywelyn calque son pas sur celui de sa partenaire d’un soir, la laissant le guider jusqu’à l’endroit où le dealer mène la danse et décide de partir sur un autre sujet, quitte à rester éveillés jusqu’à l’aube. « What got you involved with guys like Gregorio ? »