phoenix, arizona — thème city-gang sombre, flicaille, bikers. époque actuelle // réservé à un public mature et averti-18
wall of glory
hides the face, lies the snake;
terre suinte vermillonne, tapagée par les heurts de mille feux; poussière précieuse, que convoitent ainsi les bannières dissidentes. car meutes jacassent ainsi, comme chasse à courre. couchés sur montures rutilantes, reîtres arborent le cuir cousu au battant. ils gerbent l'ivre violence en marasme chantant comme saints paillards. et sur plèbe ployée, manigances ouvrent jugulaires en traînées caillées. car v'là que rouges cabales déparent l'humanité en mascarade affligeante; dans l'antre de l'oiseau aux ailes-flammes, cabots font montre de sales babines devant cavalerie, ces nobles barbares polissant l'écusson. mais ô belle ironie, à jeter ainsi soldats cannibales dans l'antre déjà ravagé!
"l'océan qui emporte,
l'océan qui déborde,
à l'intérieur"
saisons : [trente] pétales effondrés au sol, perdus à jamais, l'absence totale d'intérêt, mais jamais ne revinrent les jours de la plus précieuse insouciance, ceux dont on sait qu'ils continueront de passer par milliers.
myocarde : piétiné par les jolis mots et les douces paroles, lavé par cet espoir que tout change, et cet espoir rongé pour toujours, comme un vieil os offert à un chien. se complaît à remplir son lit, pour oublier le [vide] de sa poitrine.
besogne : vie dévouée à l'Autre, pour toujours, [assistante sociale] offerte corps et âme.
district : parce qu'elle crevait de son hypocrisie, déménagement dans le [south district] pour être plus proche des siens.
you were like an angel a moment of peace, a place to rest
s w e e t n e s s
tw: violences conjugales, sang, tentative de meurtre.
Elle n'avait été que l'énième grain de sable dans une énième journée émaillée de violence, de sang et d'insultes. Elle n'avait été qu'une nouvelle femme battue et dans ces quartiers défavorisés, elles étaient légion, se présentant au centre social parfois, le visage déformé par les coups, disparaissant simplement sans laisser de trace ou encore retrouvée morte, au petit matin, par des voisins curieux de savoir où avaient menés les hurlements dans la nuit. Car la police ne se déplaçait pas toujours, déjà pour les femmes, moins encore dans ces lieux. Combien de dossier avait elle classé parce qu'il n'y avait plus trace de la patiente ou qu'on s'était assuré qu'elle ne parlerait plus à personne fut-ce auprès d'assistants sociaux que ses pas l'auraient menée. Et elle n'avait été que l'énième victime de cette fin de journée qui avait déjà jeté Sofélia sur les rotules, après l'arrestation d'une famille entière qu'elle tentait d'aider à se défaire de la drogue, avec peu de succès, donc. Parfois, ils passaient des journées entières à perdre, et les défaites les laissaient immensément abattus, mais pourtant ils se relevaient les uns les autres, et étaient de retour au charbon, dès le lendemain. Les yeux plus cernés encore, le coeur plus arraché.
Elle n'avait été qu'une victime de plus et c'est sur son téléphone qu'elle avait appelé Sofélia ; les flics ne se déplaceraient pas, les secours non plus, ils étaient seuls. Aidée par son collègues, ils s'étaient rendus dans l'immeuble attenant au centre, et si des gamins jouaient au football dans la rue, ce calme évident cachait la cruelle vérité. Des squatteurs défoncés jusqu'à la moelle, des femmes tabassées à ne plus savoir qu'en faire, des putes qui se cachaient dans les rues sombres pour satisfaire leurs clients, et des gosses qui crevaient la dalle. Elle avait la nausée parfois, de voir les beaux quartiers si proches de la merde qu'ils vivaient chaque jour et pourtant.. Et pourtant, elle continuait, affichant son sourire le plus étincelant pour essayer de raviver les flammes prêtes à s'éteindre, pour tenter de faire croire que si, il fallait s'accrocher, le plus beau restait à venir.
Ils la trouvèrent baignant dans son sang, se tenant le flanc où était encore logé un couteau de cuisine impressionnant et, même si la femme s'en était assurée, ils vérifièrent qu'Il ne se cachait pas dans un recoin de l'appartement. Et elle connaissait la chanson, Sofélia, pas d'assurance, ils n'allaient pas la recevoir pour lui offrir le minimum de soins que méritait toute vie humaine. Alors, comme trop souvent ces derniers temps, elle envoya en vitesse un message à Sade, ses doigts poisseux accrochant l'écran de son smartphone. "need u I got another 1"
Il saurait, elle n'en doutait pas une seule seconde. Chargeant la femme dans sa voiture, elle remercia son collègue et démarra en trombes sa jeep. Elle s'en foutait du sang, elle s'en fichait des représailles, elle n'avait rien à foutre de ce qu'en penserait ses collègues - et elle était même persuadée qu'ils n'en penseraient rien de mal : tout ce qui comptait à présent, c'était de l'empêcher de se vider de son sang, et de l'encourager à porter plainte, ensuite. Ce qu'elles ne faisaient jamais. Trop peur d'argent pour s'enfuir, trop de rien pour oser partir, alors, elle resterait, jusqu'à ce que le prochaine coup de lame se loge dans le coeur et tout s'arrêterait. Les mâchoires serrées, elle en pleurait presque au volant, de son impuissance, de son incapacité à l'aider, de leur honte collective à laisser se produire tant de malheurs.
Ouvrant les portes de la voiture, il vint l'aider et elle le laissa alors tout à son art. « Sade.. I know you will but... Please, help her.. » Ils disparurent et elle resta là, sur le pavé derrière l'église là où il avait établi un hôpital clandestin qui aidait les plus démunis. Sortant de la boîte à gants un paquet de cigarettes qu'elle n'avait pas encore commencé, elle s'assit sur les marches et en alluma une. Ses mains étaient couvertes de sang mais elle n'avait même pas vu. Elle ferma les yeux, louant qui pouvait l'entendre de lui venir en aide. Entre les mains de Sade, ceci dit, elle était sûre que sa patiente avait à présent toutes les chances de survie possibles.
Il était arrivé en ville quelques années auparavant, alors qu'elle travaillait encore à la mairie de la ville. Assignée aux dossiers complexes. C'était un mensonge bien sûr, il s'agissait d'aider des gens riches à obtenir encore plus d'aides, encore plus de moyens quand on laissait leurs voisins crever dans leur merde. Sade était arrivé, la fierté en bandoulière, traînant derrière lui une gamine pas bien haute et elle s'était occupée d'eux. Elle était tombée sous le charme de ce vieux loup qui semblait vouloir refuser tout ce qu'elle proposait, mais qui se se forçait, eut égard pour sa compagne d'aventures, cette nièce qui se fondait dans son ombre. Elle avait été touchée par leur histoire et doucement, elle l'avait apprivoisé - et alors qu'il en faisait de même, elle avait lié son chemin au sien, au leur et l'amitié s'était installée, douce, sereine, irrévocable. Aujourd'hui, elle n'imaginait pas son monde sans Sade, et il lui était devenu essentiel.
besogne : soigne les bobos pour ceux qui n’ont pas de monnaie. ((médecin brigand)) robin hood toubib des dingues & paumés. ex-medic-militaire, ex-salopard, ex-molosse. en rachat de son âme perforée par pestilence sanguinolente.
she has saved me from everything that is not here.
s w e e t n e s s
le message arrive, bip bip prénom qu’il voit sur l’écran. sofelia. sourire aussitôt ravalé au constat de la demande expulsée sur quelques mots — de l’aide. il s'attendait à autre chose. un rdv. un instant pour parler. il devrait le faire. depuis le temps écoulé. définir l’amitié sur des termes particuliers. les doigts pianotent ok. il ne refuse jamais. veste vissée sur les épaules. contact. grondement. bécane grogne dans les ruelles de la ville, réveille quelques endormis de l’après-midi. le doc arrive en premier, attend le ronron du moteur de l’autre. elle arrive, accompagnée du corps blessé. sade observe un instant, architecture les dégâts. pragmatisme sans honte. mécanique de la médecine. savoir s’il doit s’épuiser à sauver ou renoncer. il l’emmène dans le dédale du sous-sol, alpague une âme, gosse en apprentissage. la survie bourdonne entre ses mains. la mort rigole dans la plaie infectée. le possible et les tentatives suspendent la vie. le rouge les habille tous de la même façon. victime ou monstres le degueuli est identique, poisseux. dangereux. méticuleux dans sa destruction. barbarie médicinale aux heures incandescentes. le jour dort quand il sort.
“You should've taken her to the hospital. It was too deep. I don't know if she'll be okay.” pas de mensonge, de fioriture médicale, de vocables bienveillantes pour masquer la triste fatalité. il ne sait pas. la lame a taillé dans le lard, profond. il n’a pas la technologie des grands hôpitaux. juste quelques couteaux, fil et aiguilles pour réparer les plaies. inciser. observer. soigner. bouchers ciseaux argentés. pas de miracle malgré l’emplacement de l’hosto dans la maisonnée d’une déité.
sade pose rétine sur les paumes féminines, y voit peinture rubis, suc noirci. “You had a big sink over there to wash your hands.” ariel aurait cru à un don céleste, une apparition sublime ou cauchemardesque. les propos désignent le bénitier dans l’entrée de l’église, un grand lavabo d’eau crade, sanctifiée. un sourire habille les syllabes blasphématoires. dieu n’existe pas dans sa réalité. sade ne croit qu’au concret, qu’à ce qu’il touche de ses phalanges abîmées. “I guess she didn't stab herself chopping onions or anything like that.” répétition du mal. les femmes poignardées par maris envahis de violence et jalousie. des cas qu’il préfère abandonner à autrui, n’a pas les épaules pour supporter l’ignominie, la vérité éclaboussée. T’as fait comme lui. Toi aussi t’as massacré. Colin bastonné jusqu’à le voir s’étouffer, manquer de crever. Amant du passé, dernière histoire achevée sur sauvagerie. T’es pas différent Sade, tu sais juste mieux l’planquer que les autres.
Le médecin fuit les regards, s’égare dans la volute immense de sa clope à peine entamée. “How are you?” Une tentative détournée pour se gorger de nouvelles heureuses, ne pas parler de lui, contourner le sujet. Sade préfère quand elle parle, articule la conversation, sait y doser des étincelles. Lâcheté permise. Ils se connaissent depuis des années, elle sait voir sous les babines, derrière les crocs élimés. Lien tendre, épaule où prendre repos. Elle endort les maux.
"l'océan qui emporte,
l'océan qui déborde,
à l'intérieur"
saisons : [trente] pétales effondrés au sol, perdus à jamais, l'absence totale d'intérêt, mais jamais ne revinrent les jours de la plus précieuse insouciance, ceux dont on sait qu'ils continueront de passer par milliers.
myocarde : piétiné par les jolis mots et les douces paroles, lavé par cet espoir que tout change, et cet espoir rongé pour toujours, comme un vieil os offert à un chien. se complaît à remplir son lit, pour oublier le [vide] de sa poitrine.
besogne : vie dévouée à l'Autre, pour toujours, [assistante sociale] offerte corps et âme.
district : parce qu'elle crevait de son hypocrisie, déménagement dans le [south district] pour être plus proche des siens.
you were like an angel a moment of peace, a place to rest
s w e e t n e s s
La fumée dévala sa gorge serrée et pendant quelques instants, quelques inspirations empreintes de mort suffirent à éloigner les miasmes de son anxiété, pour les remplacer par un vertige, léger mais prégnant. Elle n'avait plus envie de tout ça, de la violence, de la mort, du sang, des blessés, des cris et des pleurs. Elle n'avait plus envie mais elle ne savait faire que ça, accueillir des âmes tristes dans son bureau, et tenter de les apaiser un peu, doucement, come si cela n'abîmait pas la sienne, d'âme. Comme si cela n'avait aucun impact, jamais. C'était dur à en crever, parfois. C'était ridicule et elle avait envie de tomber en larmes, souvent. Mais là, Sade allait s'en occuper, elle le savait. Les ombres s'installèrent et avec elle, le renouveau de la douceur, le retour de l'apaisement, si ça n'avait pas été, il serait revenu plus tôt, s'il n'y avait plus rien à faire, elle n'aurait pas tant attendu. Serrant ses bras autour d'elle, les mégots recrachés s'accumulèrent à côté d'elle et les yeux levés vers les étoiles, elle l'entendit approcher. « I know. You're the only one I trust for them. » Eux. Eux, les grands abandonnés, ceux qui n'auraient pas jeté plus à sa blessure qu'un regard contrit, celui qui dit qu'on leur fait perdre du temps. Non, elle n'aurait pas eu confiance en l'amenant à l'hôpital, trop d'entre eux y étaient restés et elle n'ignorait pas que le "tri" ne jouait jamais en la faveur des quartiers pauvres. Lui, au moins, il essayait.
Ouvrant ses mains, baissant les yeux sur elles, enveloppant du regard les traces de sang qui avaient séché, elle se demanda quelle image elle lui offrait - elle sombrait elle-même dans la folie, parfois, et seules ses fréquentations la retenaient actuellement du bon côté. L'impression de se noyer, parfois. Souvent. Aller-retour rapide vers l'intérieur où elle lava les derniers miasmes de sa rencontre avec la jeune femme, son odeur de fer sur elle, ces sensation de ne pas avoir fait assez. Du sang sur les mains, littéralement sa faute. « She didn't. I pray for her to turn back the knife against him, one day, but I guess she'll die on it. One day, she'll die. » Nouvelle clope et l'apaisement des battements erratiques de son coeur. Même si une larme se permit de se frayer un chemin et qu'elle la chassa en riant nerveusement « How am I ? Not great but you know me, it's gonna be ok. It always does. But.. » Inspirant, elle lui bouscula gentiment l'épaule, cherchant confidence et secrets dans leur relation si particulière. Ils n'en avaient jamais reparlé, mais une certaine nuit avait jeté un voile étrange sur ce qu'ils étaient, et il lui manquait, plus qu'aucun autre ne lui avait jamais manqué. « I think we should see each other more often. Why don't we do that ? I mean, not for an injured woman.. » Elle lui adressa un sourire où il perlait encore quelque chose dans ses yeux brillants mais elle était infiniment sincère - il était de ceux qui faisaient baisser ses défenses, parce qu'elle voyait en lui, et qu'il en faisait de même. Ils étaient brisés, et ils avaient bâti des fondations plus solides en supportant celles de l'autre, c'était doux, c'était réparateur. I don't want us to be strangers.